Mon tout premier roman jeunesse. Lorsque j'ai reçu, par courriel, le projet de couverture de l'illustrateur Carl Pelletier, j'ai été profondément ému. C'est cette image, bien avant le texte, qui aura conquis mes premiers lecteurs.
Depuis des années, je lisais des romans jeunesse. Les Bob Morane m'avaient marqué, non seulement comme des livres excitants à lire alors que j'avais entre 10 et 14 ans, mais, très rapidement, comme des exemples à suivre. Très tôt, j'aurais voulu écrire des Bob Morane. Mais dès 1965, la poésie a pris le dessus, et ce n'est que quelque années plus tard que j'ai tenté d'écrire un roman jeunesse. J'ai écrit plusieurs chapitres 1 de plusieurs romans (pour jeunes et ados) qui, heureusement ou malheureusement, n'ont jamais vu le jour.
Vers 2000, l'idée de Marie Quatdoigts -- le personnage, pas l'histoire -- m'est venue comme ça, tout bonnement (en vérité, elle est venue après avoir visionné le film «Mathilda», inspiré du roman de Roald Dahl). J'ai, encore une fois, écrit plusieurs chapitres 1, sans trop savoir où je m'en allais (ni l'histoire non plus). À l'instar de «Mathilda», je faisais vivre Marie dans une famille tordue; ses parents ne l'aimaient pas, tous riaient d'elle, etc. Trop négatif. Je ne me sentais pas confortable dans une histoire pareille. Au bout d'un an, j'allais abandonner et me remettre sagement à la poésie, quand l'amorce suivante m'est arrivée: «Ah oui? Tu veux t'asseoir à ma table? Ma table à moi?» Après ces premiers mots... magiques, le reste du chapitre s'est presque écrit tout seul. Ma Marie, la vraie, venait de naître (Robert itou), avec sa façon à elle de s'exprimer et ma façon à moi de l'écrire (un monologue qui n'en est pas un vraiment). Je sentais que je tenais quelque chose de valable (même si ce drôle de monologue me semblait, judtement, peut-être un peu trop original pour plaire aux enfants: comprendraient-ils que Marie ne parlait pas toute seule?).
Depuis 1999, après 30 ans d'emplois salariés dans le monde de l'édition, j'étais devenu travailleur autonome. Je gérais donc mon temps (à peu près!). Au début de l'année scolaire 2001, j'avais accepté de faire du bénévolat à la bibliothèque de l'école que ma fille Ève fréquentait (Sainte-Maria-Goretti, à Pointe-aux-Trembles). Un après-midi, l'enseignante de 3e année de ma fille me dit: «Vous êtes écrivain. Voudriez-vous venir en classe pour faire de l'animation? Vous pourriez lire à haute voix un roman jeunesse et les enfants poseraient des questions, etc. " J'ai accepté -- tout en répétant souvent: «Je ne suis pas un animateur, je ne chante pas, je ne danse pas, je ne suis pas Annie Brocoli!» De retour chez moi, j'ai relu le premier chapitre de «Marie Quatdoigts». Puis, j'ai eu cette réflexion: «Oui, je suis écrivain. Alors, pourquoi lirais-je aux jeunes les livres des autres?»
La semaine suivante, je suis retourné voir l'enseignante et je lui ai fait cette proposition: «Je ne ferai pas d'animation. Je vais vous écrire un roman! Chaque semaine, j'apporterai aux enfants un chapitre que j'aurai écrit la semaine précédente. Les enfants poseront des questions, me feront des suggestions. La semaine d'après, j'arriverai avec un nouveau chapitre, et on recommencera l'exercice. Ainsi, au bout de deux ou trois mois, nous devrions avoir un roman complet!»
L'idée lui a plu, elle a plu énormément aux enfants qui voyaient naître presque sous leurs yeux un vrai de vrai roman, et, en juin, peu de temps avant la fin des classes, «Marie Quatdoigts» était terminé! (Dans sa première version non révisée, non corrigée, pleine de fautes...)
Mais qu'allais-je en faire maintenant? Le livre était très intéressant certes (les enfants, en classe, l'avaient adoré), mais il ne respectait pas les «règles» que certains éditeurs imposent à leurs auteurs: tel nombre de chapitres de tel nombre de pages, etc. Mon roman était plus... délinquant! Hum!...
L'été venu, en voyage familial à Ogunquit en compagnie de l'ami et grand poète Normand de Bellefeuille, je discute du livre avec ce dernier, qui travaille comme directeur littéraire aux Éditions Québec Amérique. Il m'offre de lire le roman. Il l'aime. Puis il me dit: «Pourquoi ne le soumettrais-tu pas à Anne-Marie Villeneuve, l'éditrice jeunesse chez nous?»
Après avoir lu le livre, Anne-Marie m'a demandé: «Quand publiera-t-on la suite?»
The rest is history, comme disent certains.
L'univers des «Marie Quatdoigts» évolue. Les illustrations de Carl itou. Elles deviennent de plus en plus réalistes. Plusieurs garçons ont dû tomber amoureux d'Amélie Blanche!
Ayant très longtemps fait du dessin (j'aurais voulu que ça devienne mon métier), je peux travailler de très près avec mes illustrateurs. Je leur propose des idées, des sketches, auxquels ils apportent un savoir-faire exceptionnel et, disons-le, du génie!
MAINTENANT DANS TOUTES
LES BONNES LIBRAIRIES !
La couverture du 4e roman de la série «Marie Quatdoigts»: un autre chef-d'oeuvre de Carl Pelletier!
3 avril 2006 : Le lancement des nouveautés jeunesse du printemps. La comédienne Pascale Montpetit lit un extrait des «Cruels remords de Robert». Un moment émouvant qui m'a convaincu qu'un écrivain devrait toujours avoir, à portée de la main, une comédienne ou un comédien de talent, qui lui ferait la lecture à toute heure du jour ou de la nuit. (Photo Luc Roberge)
À LA RECHERCHE DU MYSTÈRE !
J'ai eu une très belle surprise, voilà quelques semaines, lorsque j'ai reçu les deux photos qui suivent. Voici (de mémoire) un extrait de la lettre qui les accompagnait: «Cher Monsieur Des Roches, au début de l'été, j'ai eu l'immense chance de me rendre dans une ville fabuleuse: Paris. Comme je suis un grand admirateur de vos livres, j'ai tout de suite voulu aller voir le quartier du Marais à la découverte de la rue la plus mystérieuse de Paris: le Passage Dame-Liberté.» Voici donc ces photos (merci à Étienne -- car il s'appelle Étienne -- et merci à ses parents de m'avoir donné la permission de les reproduire ici):
Voici donc Étienne à la recherche du mystère! Il se tient tout près de l'Hôtel de ville, en quête de la rue...
... de la rue des Blanc-Manteaux. Il pose pour la postérité sous la plaque de la rue, à l'endroit exact ou, quelques mois plus tôt j'avais pris la photo qui suit!
La rue des Blancs-Manteaux. Si vous continuiez plus loin (vers la droite, sur la photo, vous arriveriez peut-être au Passage Dame-Liberté. J'ai bien dit «peut-être»...